Victoire, la sirène partie conquérir la liberté des femmes

7 avril 2019 0 Par nadine-moncey

Il y a très très longtemps, sur une île lointaine où les hommes ont la peau jaune et les yeux bridés, vivait une sirène prénommée Victoire, jolie rousse aux yeux verts.
Sa famille était très riche, tellement riche que sa demeure était un palais.
Victoire aimait les arts : au Nord, elle chantait ; au Sud, elle dansait ; à l’Est, elle jouait de la harpe. Elle était toujours un peu à l’Ouest, rêveuse et imaginative !
Au lever du soleil, elle rejoignait les poissons-clown, les poissons-lunes, les poissons volants. Ensemble, ils s’amusaient dans les eaux profondes. Elle était alors parée de sa longue queue de sirène aux écailles constellées d’émeraudes et de diamants.
Mais ce qu’elle aimait avant tout, c’était s’entourer de ses amis qu’elle retrouvait sur la terre ferme. Là, comme eux, son apparence était humaine. Elle aimait les entraîner dans ses aventures.
Un jour, elle apprit que la mère de sa meilleure amie était punie : elle avait osé désobéir à son mari.
Victoire s’indigna. Elle allait se battre contre cette théorie révoltante de Confucius qui veut que les femmes obéissent à leur mari. Elle partirait en lutte pour que toutes les femmes puissent être libres.
Elle rassembla toutes ses amies. Elle leur expliqua ses intentions. Elles décidèrent d’organiser une soirée avec leur mari. À cette soirée, Victoire fit comprendre aux hommes que s’ils voulaient plus de temps pour eux, il fallait qu’ils laissent leur femme libre de faire ce qu’elle voulait. Elle démontra les avantages dont ils pourraient bénéficier à agir ainsi. Après réflexion, ils acceptèrent d’adopter cette attitude. Ils allèrent même jusqu’à vouloir aider Victoire à expliquer cela à tous les mâles de l’univers.
Ils partirent tous, Victoire, ses amies, les maris vers les contrées où vivaient les Lilliputiens. Victoire, qui avait peur de son ombre, avait choisi ce pays en premier : ces petites créatures pas plus hautes que trois pommes que sont les Lilliputiens ne pourraient l’effrayer, tant leur ombre était minuscule. Arrivée sur place, Victoire rassembla les mâles de cette espèce. Après toutes les explications qu’elle leur donna, ils comprirent que leurs compagnes risquaient de les abandonner si elles n’obtenaient pas la liberté dont elles rêvaient. Ainsi, Victoire et ses amis réussirent à faire passer leur message d’égalité.
C’était sans compter sur la violence de la Coquille Saint-Jacques, Herma, ennemie jurée des Lilliputiens. Elle vivait sur une plage sur laquelle ils n’osaient plus venir par crainte de sa mauvaise humeur. Elle n’était pas d’accord avec les idées développées par Victoire, car étant à la fois mâle et femelle, elle ne s’y retrouvait plus.
Un matin, alors qu’elle était seule sur cette plage, Victoire vit tout à coup apparaître face à elle une ombre plus haute que le mont Hua. L’ombre l’enveloppa et Victoire se sentit engluée comme dans de la colle. Elle comprit que Herma l’avait enlevée. Sa prison commença à vibrer. C’était ses amies algues qui venaient à son secours. Elles firent des guili guili à Herma qui éclata de rire. Son habitacle s’ouvrit en 2 et laissa échapper Victoire qui retrouva ses camarades. Conquise, Herma ne lui en tint pas rigueur et se rallia à sa cause.
Tous rassemblés, ils prirent la route de contrées lointaines où d’autres Humains bien différents d’eux vivaient. Au début, ils rencontrèrent des hommes calmes, prêts à les écouter et la moitié de l’Humanité fut alors d’accord pour se joindre à eux. Mais ils eurent beaucoup de problèmes pour arriver vers la deuxième moitié de l’Humanité. Le plus court chemin pour y parvenir nécessitait la traversée de l’océan. Seule la Sirène Victoire pouvait s’engager sur cet itinéraire sous-marin. Ses amis la rejoindraient par les terres. Victoire s’aperçut bien vite que ces Humains ne voulaient rien changer à leurs habitudes. Ils avaient fait construire par des animaux marins mâles, au fond de l’océan, une barrière afin d’empêcher Victoire d’aller plus loin. Elle rebroussa chemin et prit son chariot ailé, dirigé par ses fidèles Dauphins. Ils la conduisirent vers les aurores boréales avec lesquelles elle s’envola, dansa dans les airs vers les Humaines qu’elle souhaitait rencontrer. Considérant les obstacles accumulés sur sa route, elle arriva en même temps que ses amis. Aux Humaines, elle leur conseilla de ne plus se laisser marcher sur les pieds. Il y en a encore aujourd’hui qui ont du mal, mais petit à petit, elles y arriveront.
Il ne restait plus à Victoire et à ses amis qu’à se rendre vers le monde des Géants. Leur roi, le poulpe géant, s’appelait Pipo. Il avait conduit sa population dans les entrailles de la Terre pour la protéger de la grande tempête qui devait arriver. La grande tempête n’était jamais venue et ils vivaient tous dans le noir. Ils lui en voulaient beaucoup car cet endroit était trop triste.
Victoire rencontra Pipo. Elle avait beaucoup de mal à le regarder tellement il était laid. Il avait une face ronde et des yeux tournant à 360°. Pipo, dès le premier regard, tomba amoureux d’elle. Il comprit bien vite qu’elle accepterait seulement de devenir son amie. Il fut tellement aimable que Victoire le trouva sympathique.
Avec le prénom qu’il portait : « Pipo », il ne pouvait pas être méchant. Il promit à Victoire d’emmener son peuple vers la lumière où les Géantes pourraient, comme les Géants, décider de leur sort.
Assez satisfaite de toutes ses réussites, Victoire décida avec ses amis qu’il était temps pour eux de repartir vers leur île natale. C’est ce qu’ils firent, mais en se promettant de garder un œil sur toutes ces peuplades : il fallait que ces dames parviennent éternellement à conserver leur liberté durement acquise.